En cette période troublée par une pandémie qui s’étend de jour en jour, une question revient régulièrement dans les familles : faut-il laisser partir le ou les enfants chez leur autre parent, que ce soit pour l’exercice d’une mesure de résidence alternée ou dans le cadre du droit de visite et d’hébergement dit « classique », c’est à dire prévu un week-end (ou plutôt une fin de semaine) sur deux et la moitié des vacances scolaires ?
Cette question est évidemment associée au confinement qui nous est imposé (et qui, vraisemblablement, devrait se durcir dans les jours qui viennent) et à l’angoisse, légitime, de tout parent, de voir son enfant infecté par le coronavirus à l’occasion d’un changement de lieu de vie.
La réponse à cette interrogation est nécessairement variable, tant les cas de figure rencontrés et les paramètres à prendre en considération sont multiples.
La situation est inédite et si un Juge Aux Affaires Familiales devait avoir à trancher ce type de contentieux (dans le cadre d’une procédure de référé à l’accès particulièrement restreint en ce moment), il ne devrait normalement prendre en considération qu’un critère essentiel : l’intérêt du ou des enfants concernés.
La réflexion de chaque parent devrait elle-même être guidée par ce seul critère, au-delà de toute réaction ou posture conflictuelle. L’heure devrait, en effet, être, plus que jamais, à la discussion entre « adultes responsables » ; puisqu’il s’agit d’éviter aux enfants d’être, dans un contexte déjà très anxiogène pour eux, l’objet de tiraillements les conduisant à un conflit de loyauté.
Chaque parent a, bien évidemment, ses arguments à faire valoir, mais il faudrait, à mon sens, ne retenir, en l’état, que les solutions ne mettant personne en danger en contribuant à propager la maladie.
Le maintien des enfants sur leur lieu actuel de résidence paraît donc la moins mauvaise des décisions à prendre, sachant que les choses pourront peut-être évoluer si l’on tient compte d’une longue durée de strict confinement faisant écarter le risque d’une contamination de l’ensemble des membres d’un même foyer.
Dans tous les cas, il est sage qu’un parent susceptible d’être exposé au virus, du fait de sa profession, renonce, transitoirement, bien entendu, à faire valoir ses droits.
Heureusement, de nombreuses solutions existent pour garder le contact à distance ; des accords pouvant également être pris entre les cotitulaires de l’autorité parentale pour rattraper le « temps perdu » avec ses enfants, en permettant au parent privé de ses droits, du fait des circonstances exceptionnelles que nous traversons, de bénéficier de « jours de garde » supplémentaires lorsque les risques encourus se seront éloignés.
François REGNIER, Avocat spécialiste en droit de la famille et du dommage corporel, inscrit au barreau d'Amiens, dont le cabinet est situé à Abbeville.